vendredi 1 mars 2013

Plaid



Aujourd’hui, je voudrais vous faire découvrir le groupe électro Plaid, alors appuyez sur "play" ! 
Dans le genre, ils mettent au point une musique vraiment riche et variée. J’aurais pu choisir n’importe quel morceau de n’importe quel album car je les aime tous. Cependant, j’ai trouvé opportun de mettre le doigt sur 35 summers, extrait de l'album Scintilli, paru en 2011. Avec african woods par exemple, il m’invitait à introduire la question de la reproduction du réel dans l’art. Tout un programme !
Alors, sans vouloir imposer ma perception, en écoutant ce morceau les yeux fermés, vous allez peut-être tout comme moi vous sentir doucement immergés dans une grotte glacée en période de fonte où les gouttes d’eau perlent au bout de nombreuses stalactites.
J’ai tendance à trouver la musique supérieure aux autres arts car l’harmonie ne prend pas pour modèle le réel : elle est vraiment abstraite et sans concurrence. Même dans les 4 saisons, Vivaldi crée des correspondances avec des sonorités issues du réel mais il n’existe pas de composition similaire.
Vous me direz, il est loin le temps où Baudelaire version critique d’art s’indignait du succès de la photographie, qui allait imposer une vulgaire reproduction bête et méchante du réel dans l’art. Depuis, les plasticiens de tous domaines ont démontré qu’il n’en était pas question.
Le problème c’est que je vois strictement avec les mêmes yeux les tableaux purement abstraits pour ne citer qu’un genre et les paysages grandioses de montagne que j’affectionne tant. Et là, si l’on cherche l’effet du visible, il n’y a pas photo, c’est le cas de le dire ! Cela justifierait donc les pratiques contemporaines qui n’ont pas pour fin un résultat esthétique au sens traditionnel du terme. Je ne parle même pas des pratiques mimétiques qui encore aujourd’hui, séduisent de nombreux adeptes. Mais à quoi sert-il de s’escrimer à produire de pâles copies de dame nature ?...
…C’est quand même un drôle de discours dans un blog d’illustration jeunesse, mais voici ma conception : Je revendique une pratique traditionnelle dans la démarche qui vise à insuffler la vie dans mes petits personnages, dont l’écart avec le réel est quand même manifeste et recherché. J’aurai atteint mon but si petits et grands se retrouvent les 2 pieds dans le paysage de mon âme.
J’en reviens à mon morceau électro : Pourquoi ai-je donc choisi la seule musique ayant un référent réel, puisque je viens de dénigrer cette inclination qui précisément ne concerne pas ce domaine? Et bien parce qu’elle introduit des suites de sons apparemment aléatoires mais qui me semblent mûrement réfléchis et que l’écart se joue subtilement dans le choix des sons électro. Ce n’est certes pas nouveau lorsqu’on pense aux bruitistes italiens du début du XXème, ainsi qu’aux avant-gardistes comme Pierre Schaeffer mais c’est réactualisé d’une manière habile. On est dans un résultat étrange mais harmonieux, ce qui peut bien sûr paraître manquer d’audace mais qui est heureux ! Les 2 peuvent bien coexister.
 Maintenant si vous ouvrez les yeux, le clip vient enrichir la musique d’une nouvelle vision : marine cette fois-ci. Et il est étonnant de constater qu’une suite de sons ponctuels, métalliques et rythmiquement désordonnés peut coller si bien avec des mouvements amortis et si caractéristiques d’un corps drapé et immergé, accompagné de tentacules et d’effets d’encre.
 Si vous avez lu mon article sur Lescop, où je disais que sa musique m’évoquait une vision mécanisée du corps, c’est exactement et curieusement le même effet qui s’est produit quand j’ai vu sur scène la façon déliée de se mouvoir du chanteur. Comme quoi, l’écart est extensible jusqu’à l’extrême! A méditer !
En résumé, je trouve que la citation suivante s’applique bien à la musique que vous venez d’écouter :

« Le miracle de la musique concrète, que je tente de faire ressentir à mon interlocuteur, c'est qu'au cours des expériences, les choses se mettent à parler d'elles-mêmes, comme si elles nous apportaient le message d'un monde qui nous serait inconnu. »
        
                                                                                        P. Schaeffer
                                                                                                   
                                                                                                                       

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